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La situation des journalistes pigistes en Midi-Pyrénées

publié le jeudi 9 février 2012

L’AJT-MP a mené une enquête sur les conditions de rémunération des journalistes pigistes en Midi-Pyrénées, réalisée sur internet en décembre 2011 et janvier 2012.

Les résultats de cette enquête ont été rendus publics lors d’une soirée spéciale pigistes qui s’est tenue le 6 février à Toulouse. Vous trouverez ici le détail de ces chiffres (en pdf).

Une cinquantaine de journalistes pigistes de tous les âges ont répondu au questionnaire, avec une plus forte représentation des 21-40 ans (70%). Beaucoup de ces journalistes sont expérimentés dans la pige, puisque 42% travaillent comme cela depuis plus de cinq ans. Plus de la moitié d’entre eux travaille à la fois pour des médias de Midi-Pyrénées et des médias nationaux, majoritairement en presse écrite (78%).

Les résultats font apparaître une réalité plutôt inquiétante :
- 43% des journalistes pigistes n’ont pas la carte de presse (qui facilite pourtant grandement l’obtention de l’ancienneté professionnelle et l’accès à la formation),
- 45% ont certaines ou toutes leurs collaborations payées moins de 50€ brut le feuillet,
- 63% n’ont vu aucune augmentation du tarif de piges depuis au moins cinq ans
- 39% gagnent moins de 1000€ net par mois et 72% moins de 1500€ !
- La situation s’est dégradée pour la plupart des journalistes pigistes, sauf les 20-30 ans, et cette dégradation se généralise avec l’âge : pour 50% des 40-50 ans et 57% des plus de 50 ans.

Dans de nombreux cas, la convention collective des journalistes n’est pas respectée :
- 37% ne sont pas toujours, voire jamais, payés en salaires pour leurs collaborations en presse (mais en droits d’auteurs ou facture),
- un tiers des pigistes ne touche ni 13e mois ni congés payés,
- 53% ne touchent jamais l’ancienneté professionnelle à laquelle ils ont droit
- 63% ne sont pas toujours, voire jamais, remboursés de leurs frais professionnels.

Les journalistes pigistes ne bénéficient presque jamais des avantages des journalistes en poste :
- 98% ne bénéficient pas d’une mutuelle par leur employeur,
- 74% ne bénéficient pas des prestations du comité d’entreprise (alors que la masse salariale des pigistes est comptabilisée dans le budget du CE).

Même si la responsabilité des employeurs est totale dans ces situations injustes et contraires à la convention collective, le manque de combativité et d’organisation des pigistes quand il s’agit de faire respecter leurs droits est flagrante :
- 93% des journalistes pigistes ayant connu un épisode de maladie ou de maternité n’ont pas demandé le complément de salaire auquel ils ont droit,
- 73% n’ont jamais demandé d’heures de formation auxquelles ils ont droit dans le cadre du DIF,
- 54% ne sont jamais intervenus auprès de leurs employeurs pour faire respecter leurs droits ou demander une augmentation,
- 69% n’ont jamais voté aux élections professionnelles,
- 76% ne sont pas syndiqués,
- 59% ne font partie d’aucun réseau de pigistes (liste piges, Profession : pigiste, etc.).

Pour Martine Rossard, journaliste pigiste et élue SNJ, la faiblesse de la rémunération qui apparaît dans cette enquête « montre la justesse de l’action menée par le SNJ pour obtenir des barèmes minimaux, mais d’un autre côté affaiblit le front syndical face aux représentants patronaux de branche (presse régionale, magazine, professionnelle) qui ne voient pas pourquoi ils paieraient un tarif décent à des journalistes qui acceptent d’être sous-payés. Rappelons que la référence reste le barème des quotidiens nationaux qui augmente chaque année au même rythme que les salaires des journalistes mensualisés et qui atteint aujourd’hui 64,62 euros brut le feuillet ».

La pige : « le ventre mou de la profession » ?

Thierry Buzbach, président de l’Association Profession : Pigiste [1], venu de Lille pour participer à notre soirée-débat, a rappelé que certains cas de grèves de pigistes ont pu, par le passé, permettre une augmentation du tarif de piges pour tous, dans un contexte où ce tarif était variable « à la tête du client ».

Emmanuelle Durand-Rodriguez, rédactrice en chef du magazine économique régional Objectif News et ancienne pigiste elle-même, a rappelé que les journalistes en poste avaient eux aussi des difficultés à faire reconnaître leurs droits.

Michel Paquet, pigiste et élu SNJ dans le groupe WKF (qui emploie plus de 500 pigistes dont un certain nombre en Midi-Pyrénées) qui n’a pas pu venir à notre soirée, estime que notre étude « révèle la dégradation de notre profession, et surtout que la pige est clairement devenue le ventre mou du journalisme, c’est-à-dire l’endroit par où on déconstruit la profession. ». Sévère, il considère que « cette accumulation de signaux, si elle était vérifiée à une plus grande échelle, montrerait alors que la profession est en train de se résigner ». Face à cela, il appelle à réagir.

L’AJT-MP propose aux associations de journalistes et aux clubs de la presse dans les différentes régions de reprendre cette enquête afin de pouvoir vérifier ces indicateurs à une plus grande échelle, mener des comparaisons régionales et faire une synthèse nationale.

Si vous souhaitez reprendre cette étude (questionnaire généré sur Google Docs), vous pouvez nous écrire à ajt ajt-mp.org.

Catherine Sanson-Stern

Notes

[1] Profession : Pigiste est une association de pigistes créée il y a dix ans, qui permet de créer du lien, de faire du réseau et de faire émerger les meilleures pratiques. Elle organise les 2 et 3 juillet prochains à Lyon les deuxièmes « 48 heures de la Pige », une bonne occasion de rencontre et de formation pour les pigistes.

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